Le Département de Génétique & Evolution, précédemment département de Zoologie et Biologie Animale, est issu de l'ancien Institut de Zoologie (Anatomie comparée, Station de Zoologie, Zoologie générale et Endocrinologie), auquel se sont joints de nouveaux laboratoires. Etant l'un des quatre principaux piliers de la Faculté des Sciences, l'Institut de zoologie s'est développé parallèlement aux anciens Instituts de Physique (actuellement Section de Physique), de Chimie (actuelle Section de Chimie) et de Botanique.
Le développement de la biologie animale à Genève est lié au fait que la zoologie et l'anatomie comparée - disciplines très vastes et essentiellement descriptives, mais permettant aussi des approches spéculatives qui ont été, pendant de nombreuses années, le centre de gravité du point de vue organisation, enseignement et recherches - se sont enrichies, avec le temps, de nouvelles connaissances et spécialisations. Si on considère l'histoire de l'enseignement et de la recherche biologique à Genève, on peut constater que certaines lignes de recherches, actuellement très importantes dans notre département, se sont constamment développées, depuis longtemps. En effet, la zoologie genevoise a toujours joué un rôle de pionnier.
Le pionnier: Augustin-Pyramus de Candolle
La première chaire de zoologie fut attribuée à Augustin-Pyramus de Candolle en 1802, en tant que professeur honoraire. Etant donné qu'il avait été nommé à Montpellier professeur de botanique aux Facultés de Médecine et des Sciences, la chaire de zoologie, qu'il n'avait jamais occupée effectivement, revenait de droit à Louis Jurine, professeur honoraire d'anatomie et de chirurgie (1802-1809), puis professeur honoraire de zoologie (1809-1815).
La chaire honoraire de zoologie fut transformée en 1815 en une chaire effective d'histoire naturelle pour A.-P. de Candolle qui y enseigna en même temps la botanique et la zoologie jusqu'en 1835. Lorsqu'il se retira, ce double enseignement fut réparti en deux chaires distinctes, botanique et zoologie. François-Jules Pictet de la Rive fut nommé titulaire de la chaire de zoologie et d'anatomie comparée. Il fut professeur de zoologie de 1835 à 1848 et professeur de paléontologie, zoologie et anatomie comparée de 1848 à 1872. Ses premières recherches portèrent sur les insectes: ses études sur les Phryganes, les Perlides et les Ephémères établirent sa réputation. A diverses reprises, il se fit suppléer pour l'anatomie des invertébrés, principalement par Edouard Claparède (professeur honoraire et suppléant de zoologie de 1862 à 1871), Aloïs Humbert (attaché à la direction du Musée d'histoire naturelle en 1852) et Carl Vogt (professeur de géologie de 1853 à 1872 et de géologie, zoologie et anatomie comparée de 1872 à 1895).
Carl Vogt
Ce dernier, qui enseignait depuis vingt ans déjà la géologie à l'Académie, succéda à Pictet de la Rive, mort en 1872. C'est ainsi que dès le 13 décembre 1872, date de sa nomination, Carl Vogt mena de front quatre enseignements: la géologie, la paléontologie, la zoologie et l'anatomie comparée, qu'il conserva jusqu'à sa mort, le 5 mai 1895. Peu de temps après sa nomination, il avait publié plusieurs observations sur l'anatomie des mollusques gastéropodes et d'autres recherches importantes sur les Siphonophores et les Tuniciers pélagiques de la mer de Nice, etc…
De 1878 à 1886, l'enseignement des sciences zoologiques fut enrichi d'une chaire ordinaire d'embryologie et de tératologie qui fut attribuée au professeur Hermann Fol, de 1878 à 1885. Celui-ci fut également, de 1885 à 1892, professeur de morphologie générale comprenant l'anatomie microscopique comparée et la zoologie médicale. Lors de sa démission, cette chaire fut transférée à la Faculté de médecine et rattachée à la chaire d'histologie normale.
En 1880, Emile Yung, assistant de Carl Vogt et privat-docent depuis 1879, publia en collaboration avec Carl Vogt un « Traité d'anatomie comparée pratique »; ses recherches furent en grande partie effectuées dans le domaine de la physiologie expérimentale. En 1883, une chaire extraordinaire de zoologie générale lui fut attribuée, il l'occupa jusqu'en 1895; il y donna des cours sur la théorie évolutive du règne organique, l'anthropologie et les facultés mentales des animaux. En 1895, il succéda à Carl Vogt comme professeur ordinaire de zoologie et d'anatomie comparée. Le 7 décembre 1895, le professeur Maurice Bedot, directeur du Musée d'histoire naturelle et fondateur de la Revue suisse de zoologie, remplaça Emile Yung à la chaire extraordinaire de zoologie générale. Ensuite, en 1913, cette chaire fut confiée au professeur Emile André qui fut alors chargé de donner deux heures de cours par semaine, consacrées à la zoologie générale et à l'enseignement du parasitisme animal.
Le 1er novembre 1918, deux nominations eurent lieu: la première fut celle du professeur E. André, déjà professeur extraordinaire, qui fut reçu à l'ordinariat avec un enseignement de protistologie, de parasitologie et de zoologie lacustre; quant à la deuxième nomination, pour la zoologie et l'anatomie comparée, l'Université et le Conseil d'Etat adressèrent un appel à Emile Guyénot, docteur en médecine et en sciences, lauréat du prix Longchamp de l'Académie des sciences de Paris pour ses recherches de biologie.
L'expérimentateur: Emile Guyénot
Le nouveau titulaire donna à son enseignement une orientation vers la biologie générale. Le cours du semestre d'hiver devint un cours de zoologie générale (cellule, tissus, ovogenèse, spermatogenèse, fécondation, parthénogenèse, sexualité, etc.) et de l'étude des parasites de l'homme. L'enseignement du semestre d'été resta consacré à l'anatomie des vertébrés. Il fut refondu à la lumière des conceptions modernes en matière d'évolution. A cet enseignement fut ajoutée une heure réservée à un cours de biologie générale qui traitait de problèmes divers variant chaque année (transformisme, hérédité, variation, déterminisme du sexe, endocrinologie, physiologie du développement, etc.). Pour les exercices pratiques, les étudiants ne disposaient que de microscopes archaïques. Un crédit spécial permit d'acheter un certain nombre de microscopes modernes.
Emile Guyénot, en acceptant la chaire de zoologie générale à l'Université de Genève, était bien résolu à en faire un centre de biologie expérimentale. Il n'y serait jamais parvenu si l'institut dont il avait la direction n'était devenu en 1923 l'un des trois bénéficiaires de la donation Georges et Antoine Claraz. Dès que fut fondée, en 1922, la première Station de Zoologie expérimentale au chemin Sauter, Emile Guyénot y créa des exercices pratiques de génétique (en hiver) et de technique biologique expérimentale (en été). Les étudiants y réalisaient tous les croisements qui sont à la base des lois de l'hérédité (monohybridisme, dihybridisme, trihybridisme, hérédité liée au sexe, linkage, crossing over). Ils apprenaient à faire des opérations aseptiques sur les animaux anesthésiés. En 1933, une aide importante de la Fondation Rockefeller permit la construction, à la route de Malagnou, sur un terrain offert à l'Université de Genève par la Société Académique, d'une nouvelle Station de Zoologie expérimentale.
Emile Guyénot a révolutionné l'enseignement de la zoologie à Genève en l'adaptant à la fois aux médecins et aux biologistes. Plusieurs directions de recherches furent abordées. Mais c'est dans le domaine de la régénération qu'il a le plus développé ses idées en démontrant l'existence, chez l'adulte comme chez l'embryon, de territoires organoformatifs à potentialité spécifique que les nerfs ne font que stimuler, et dont les capacités intrinsèques de réaction décident de la morphogenèse réalisée. Notion féconde et élargie à bien d'autres domaines. Emile Guyénot étudiât également la sexualité et intersexualité des batraciens, les chromosomes plumeux des batraciens et la génétique et cytogénétique drosophiliennes. Il travaillât aussi sur des études chromosomiques des sporozoaires, invertébrés, vertébrés, sur l’action des rayons UV et X sur les gonocytes (castration embryonnaire) et sur la mutabilité de la Drosophile, sur la vie aseptique de la Drosophile et de l'Anguillule du vinaigre ainsi que sur l’endocrinologie des hormones gonadotropes, thyréotropes et corticotropes hypophysaires.
Kitty Ponse participa durant de nombreuses années, en qualité de chef de travaux, à l'enseignement pratique donné à la Station de Zoologie expérimentale. Elle avait collaboré activement aux recherches effectuées dans le domaine de l'endocrinologie et fut nommée professeur ordinaire à la chaire d'endocrinologie expérimentale en 1961.
La même année (1961) eut lieu la nomination de Michael Fischberg qui, en tant que successeur de E. Guyénot, prit la direction de la Station de Zoologie et du laboratoire de Zoologie générale. A l'occasion de la succession de E. Guyénot, nous trouvons donc trois laboratoires:
- Biologie du développement et Génétique, situé à la Station de Zoologie et en partie au bâtiment central de l'Université avec les professeurs M. Fischberg et A. Blackler
- Endocrinologie, situé dans un nouveau bâtiment construit entre-temps, avec le professeur K. Ponse
- Anatomie et Physiologie Comparées, situé au bâtiment central de l'Université, avec le professeur Hansjörg Huggel, nommé professeur ordinaire en 1969
Le professeur Blackler a ensuite quitté l'Université de Genève en 1964. Suivent les nominations de Gérard de Haller en Protistologie en 1969, celle de Hans Gloor en Génétique en 1970, et celle de Marco Crippa pour l’Embryologie Moléculaire en 1971.
Avec la nomination de Karl Illmensee, en 1977, le département se renforçait dans le domaine de l'embryologie des vertébrés, en particulier des petits rongeurs, puis dans celui de la biologie des neuropeptides, avec la nomination du Professeur Michael O'Shea, en 1984 et en systématique animale avec la nomination du Professeur Louisette Zanninetti, affiliée également au département de géologie et paléontologie de la Section des sciences de la terre (1984).
Les temps modernes
Les départs des professeurs Crippa (1984), O'Shea (1988) et Illmensee (1987) coïncident avec une réorganisation majeure de la Section de biologie comprenant le transfert de deux chaires vacantes pour la création du nouveau Département de biologie cellulaire. Parallèlement, commence la première étape de la construction du bâtiment Sciences III, destiné à regrouper toute la section de Biologie de la Faculté des Sciences.
C'est le Professeur Pierre Spierer, spécialiste de la génétique moléculaire de la mouche Drosophile, nommé en 1990, qui prend alors la direction du Département en 1991 ainsi que la Présidence de la section de Biologie en 1992. C'est sous sa direction que le département commencera son installation dans les nouveaux locaux du bord de l'Arve. Dès lors, le Département continuera son orientation privilégiée vers la génétique du développement des animaux, notamment par les nominations des professeurs Vincenzo Pirrotta en 1992, lui aussi expert en génétique de la mouche Drosophile, et Denis Duboule, spécialiste de la génétique du développement des mammifères, en 1992. Le professeur Pirrotta reprendra la direction du Département de 1992 à 1997 et prendra sa retraite anticipée en 2004. Le Département a été dirigé par le professeur Denis Duboule de 1997 à 2017, puis par le professeur Ivan Rodriguez.
En 2001 aussi, la Confédération crée à Genève le Pôle de Recherche National 'Frontiers in Genetics'. Ce programme évalué et sélectionné par des experts internationaux, assure un financement important pour 12 ans avant sa reprise par l’Université. Il comprend la création de services, principalement en génomique et microscopie, la mise sur pied d’une école doctorale nationale, et le soutien de projets de recherches collaboratifs. Les professeurs Duboule, Karch, Pirrotta, Spierer et Rodriguez du département en feront partie. C’est au sein du département que la direction et l’administration de ce pôle d’excellence s’installera en 2001, renforçant ainsi la visibilité de la place Genevoise dans les domaines de la génétique classique et moléculaire.
En 2003 se termine la construction du bâtiment Sciences III, dans lequel se regroupent finalement le Département de zoologie et biologie animale, ainsi que trois autres départements de la Section de biologie.
C'est en 2006 que la station de zoologie expérimentale de Malagnou ferme ses portes, dirigée depuis 1996 par le Professeur Duri Rungger. 73 ans après la construction de cette station de zoologie se ferme ainsi une page majeure de l'histoire de cette discipline à Genève. Les locaux seront définitivement abandonnés par le département en 2010. En 2012, le Professeur Pierre Spierer prend sa retraite, après avoir œuvré d’abord comme Président de la section de Biologie, puis en tant que Doyen de la Faculté des Science entre 2004 et 2007 et finalement comme vice-Recteur de notre Académie entre 2008 et 2011.
Naissance d'un nouveau département: GenEv
Entre 2005 et 2010, le département renforce ses compétences dans les domaines de la génétique et de l’évolution, au travers de divers recrutements. L’accent donné à ses deux disciplines, dont l’intérêt dépasse le seul domaine de la science, conduira le département à changer de nom, afin de mieux afficher ses particularités, tout en continuant à enseigner les branches fondamentales qui en ont fait l’histoire. A cet effet, le département est au bénéfice d’une convention le liant au muséum d’histoire naturelle de la ville de Genève.
En 2011, le nouveau Département de Génétique et Evolution voit le jour. En 2011 également, suite à une réorganisation de l’ancien département d’anthropologie, l’Unité d’anthropologie (UA) rejoint notre département, élargissant ainsi ses domaines de compétence et d’enseignement.
Le département de Génétique et Evolution comprend actuellement les groupes de recherche des Professeurs Brigitte Galliot, Michel Milinkovitch, Ivan Rodriguez, Alessandro De Simone, Emi Nagoshi et Alicia Sanchez-Mazas, ainsi que ceux des Drs Daniel Pauli, Estella Poloni et Mathias Currat.