Le comportement locomoteur circadien
Rythme circadien
Les rythmes circadiens représentent l’ensemble des rythmes du comportement et des processus physiologiques (Fig. 1) que l’on trouve dans la plupart des organismes vivants, allant de la cyanobactérie à l’être humain. Ces cycles ont une période approximative de 24 heures, soit la même que la rotation terrestre. La perturbation des rythmes circadiens chez les humains provoque des troubles du sommeil et est également associée à de nombreux autres problèmes de santé tels que les troubles bipolaires et la dépression (1, 2).
Figure 1
Les rythmes circadiens chez la drosophile
Figure 2
Chez la drosophile, le rythme circadien contrôle divers processus physiologiques et comportementaux (Fig. 2). Dans les cycles jour-nuit (LD) l’activité des mouches est bimodale et augmente à l'aube et au crépuscule. Ces rythmes d’activité persistent aussi dans une obscurité constante (DD). Dans le cerveau, environ 150 neurones contenant chacun une horloge circadienne constituent le circuit neuronal qui contrôle le rythme circadien d’activité. Un sous-groupe de neurones latéro-ventraux (s-LNvs) contrôle l'activité circadienne du matin, tandis que les neurones latéro-dorsaux (LNds) contrôlent celle du soir (3-7), s-LNvs sont indispensables au rythme circadien en condition DD. Ainsi, les neurones s-LNvs sont appelés « M-cellules », car ils sont les oscillateurs pour le matin et les oscillateurs majeurs en condition DD (8).
Projets de recherche
Malgré les progrès de la recherche sur les rythmes circadiens, notre compréhension en est encore limitée. En particulier, les rôles de nombreux neurones d'horloge, l'organisation des circuits circadiens et les bases neurochimiques de la communication neuronale entre les neurones d'horloge restent mal connus.
1. Les mécanismes moléculaires de l'organisation et le fonctionnement du circuit circadien
Pour comprendre le fondement moléculaire de l'organisation et le fonctionnement du circuit circadien, nous avons analysé l'expression des gènes dans plusieurs sous-groupes de neurones d'horloge en utilisant une nouvelle technique d’analyse d'expression génique (9, 10). L’analyse a en outre montré que deux gènes de récepteurs nucléaires, unfulfilled (unf; DHR-51) et E75, sont exprimés dans les M-cellules. De plus, nous avons montré que UNF et E75 jouent un rôle essentiel dans le fonctionnement des M-cellules (11, 12). Nous poursuivons nos efforts pour mettre à jour les mécanismes moléculaires par lesquels UNF et E75 contribuent au fonctionnement des M-cellules.
2. La dynamique du circuit circadien
On pense que les rythmes moléculaires contrôlent l'activité neuronale rythmique et / ou la libération du transmetteur. A l'inverse, certaines études indiquent que la signalisation inter-neuronale contribue à la synchronisation et à l'amplitude des rythmes de neurones d'horloge (13, 14). Notre objectif est de comprendre comment la communication inter-neuronale affecte l’horloge moléculaire, et comment les rythmes moléculaires et neuronaux sont intégrés pour générer l’activité rythmique. À cette fin, nous avons développé des marqueurs fluorescents qui permettent l'enregistrement de l'oscillation moléculaire dans le cerveau des mouches en utilisant le cerveau cultivé in vitro. Le système permet également le contrôle spatio-temporel de l'expression génique et l'activité neuronale.
La maladie de Parkinson
La maladie de Parkinson (PD) est un trouble du mouvement caractérisé par des défauts locomoteurs tels que les tremblements, la bradykinésie, la rigidité et instabilité posturale. La PD affecte plus de 1% de la population mondiale de plus de 60 ans. Les symptômes moteurs de la PD semblent être principalement dus à la perte de neurones dopaminergiques (DA) dans la substantia nigra (SN). Malgré les progrès dans la découverte de gènes associés à la PD familiale, la connaissance de la pathogenèse de la PD est encore limitée. En particulier, pourquoi la dégénérescence est-elle spécifique aux neurones DA et pourquoi elle est progressive? Le manque de modèles animaux qui montrent la dégénérescence véritablement progressive des neurones DA a également entravé l'étude sur cette question centrale.
Projets de recherche
Notre objectif global est de comprendre les mécanismes de la dégénérescence sélective et progressive des neurones dopaminergiques. Nous avons récemment créé un nouveau modèle de la PD chez la drosophile qui permet l’analyse des mécanismes sous-jacents à la dégénérescence sélective et progressive des neurones DA (15). Chez le nouveau modèle Fer2 (48 related-2) mutante, les neurones dopaminergiques du cerveau dégénèrent progressivement et la locomotion est gravement détériorée (vidéo 1, 2). De plus, nous avons montré que la dégénérescence des neurones dopaminergiques dans les mutants Fer2 coïncide avec l'augmentation d’espèces réactives à l'oxygène (ROS) ayant un dysfonctionnement mitochondrial dans les neurones DA. Parce que l'augmentation de la production de ROS et les dysfonctionnements mitochondriaux sont les caractéristiques pathologiques de la PD, nos résultats soulignent que les mutants Fer2 représentent bien les caractéristiques cellulaires et comportementales de la PD (15).
Suite à ces résultats, nous étudions les voies génétiques qui se situent en amont et en aval de Fer2 pour comprendre les mécanismes par lesquels Fer2 contribue à la survie des neurones DA. Sur la base des connaissances acquises dans notre recherche en utilisant les mouches, nous générons de nouveaux modèles de la PD chez la souris.
Video 1: Les neurones dopaminergiques du cerveau d’une mouche sauvage.
Video 2: Les neurones dopaminergiques du cerveau d’un mutant Fer2.
References
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